[Chronique] Vince Staples – Summertime 06′

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Vince Staples n’a que 22 ans et fait déjà partie de la cour des grands. Impressionnant par sa maturité et sa direction artistique, le gamin de Long Beach a sorti cette semaine Summertime 06′, un EP à double disque (20 titres) qui nous plonge dans les endroits délabrés et mal-fréquentés de Long Beach, plus précisément le quartier nord. Lieu qui a vu grandir cet artiste promis à un joli avenir. Ce projet est aussi un retour en-arrière en 2006, année où Vince ne comptait que treize printemps mais se débrouillait déjà en ramassant de l’argent illégalement. 2006 était aussi pour lui une année où nombre de ses proches ont été tués. Année de transition qui lui a fait prendre conscience de la situation dans laquelle il se trouvait. Un album calibré du début à la fin où le passé du jeune artiste est dévoilé avec brio dans une ambiance sombre qui colle toujours aussi bien au style du rappeur.

Long_Beach_California_Birds

Long Beach est connu pour ses plages balnéaires mais aussi pour ses nombreux homicides et c’est avec ce paradoxe que le premier disque commence. Une instrumentale grave et sombre accompagnée d’un fond sonore de vagues qui échouent sur les côtes ainsi que le cri de quelques mouettes, le tout est violemment stoppé par un coup de feu qui enchaîne avec Lift Me Up et ses lourdes basses agrémentées des couplets lourds et tranchants de Staples. Ici, le thème de l’album est vite annoncé comme un contraste. D’un côté, l’été semble chaud bouillant et festif mais de l’autre, LBC est vite bercé par la violence et ses crimes.

Toujours illustré dans une ambiance morbide que l’on pourrait s’imaginer qu’en noir et blanc, la suite de l’histoire est racontée dans Norf Norf. Le quartier nord de Long Beach est présenté comme un endroit risqué où tout le monde se connaît. Les policiers, eux, essaient tant bien que mal d’imposer leur loi mais, en vain, le refrain du morceau démontre le contraire. Le tout est suivi par une mélodie agrémentée d’une sirène angoissante suivie de quelques percussions aiguës.

Mais Vince Staples est aussi attiré par les femmes qui lui permettent de rester un peu en-dehors de ce cercle vicieux. Il apprécie en particulier une latino-américaine qui réside vers son voisinage. Dans Loca (ambiance latine) l’emcee avoue que cette femme le rend fou. D’ailleurs on peut apprécier la jolie prestation de Jhene Aiko qui vient prêter main forte dans Lemme Know qui est une suite de la relation citée dans le morceau précédent.

Retournons dans des faits plus marquants. La drogue et le traffic qui arpentent les rues (Dopeman). L’addiction, la perte de contrôle et toutes les conséquences qui s’en suivent (Jump Off The Roof). Tous des faits impregnés dans une société comme celle d’où est originaire Vince.

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Dans la deuxième partie du projet, le rappeur relate des cas plus personnels comme la rue où il habitait (3230) ou la mort de ses proches dans le majestueux Surf et son impressionnante instrumentale qui nous plonge directement au cœur des rues. Cependant, on retrouve aussi des morceaux plus paisibles et émotionnels comme Might Be Wrong où le rappeur va creuser plus loin et essaie de chercher l’origine de tout ces délits et crimes perpétués. Un morceau à donner la chair de poule qui est parfaitement géré par les chants vocaux de James Fauntleroy ainsi que Cocaine 80’s.

Ensuite, plus on s’approche de la fin de l’album, plus Vince Staples aborde des problèmes sociaux et complexes comme dans C.N.B. (Coldest Nigga Breathing) où il n’hésite pas à divulguer les soucis actuels qui résident dans sa communauté comme le racisme, la pauvreté, la violence ou encore la gentrification. L’EP se finit par un morceau qui sample Outkast. Intitulé Like It Is, il aborde, contrairement aux autres, une once d’espoir et de réussite pour les résidents des quartiers pauvres.

I been through hell and back, I seen my momma cry
Seen my father hit the crack then hit the set to flip a sack
I done seen my homies die then went on rides to kill ’em back
So how you say you feel me when you never had to get through that?
We live for they amusement like they view us from behind the glass
No matter what we grow into, we never gonna escape our past
So in this cage they made for me, exactly where you find me at
Whether it’s my time to leave or not, I never turn my back

Summertime 06′ s’impose sans aucun doute comme l’album qui pourrait concurrencer celui de Kendrick en fin d’année. Ironie du sort, le sujet et le thème qui gravite autour du projet nous rappelle aussi un certain Good Kid, M.A.A.D City sorti il y a trois ans par… Kendrick Lamar qui lui, s’occupait de raconter son histoire d’enfance vécue dans les quartiers de Compton. Long Beach ou Compton, la question va plus loin et ces deux artistes nous l’on bien fait comprendre. Avec un projet qui s’apparente plus à un documentaire que l’on pourrait visionner à la télévision, Vince Staples nous fait prendre conscience (encore une fois) des problèmes économiques, sociaux et politiques que traverse les Etats-Unis. Par ailleurs, il nous fait prendre conscience également qu’il fait désormais partie de la cour des grands. En effet, après un Hell Can Wait qui avait fait la quasi-unanimité dans les critiques l’année passée, le jeune californien place la barre encore plus haute avec Summertime 06′. Un projet géré de main de maître avec l’aide de No I.D., le producteur exécutif qui a su instaurer une ambiance terne et morose qui convient parfaitement à Vince afin qu’il puisse exploiter à merveille ses couplets tranchants qui respirent l’honnêteté et la souffrance endurée.

Kevin

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[Top Of The Month US] Mars 2015

Outre certains extraits des projets qui ont marqué le mois de mars, To Pimp A Butterfly de Kendrick Lamar, 56 Nights de Future, Ludaversal de Ludacris ou encore Pronto de Freddie Gibbs, vous retrouverez dans ces vingt titres l’assurance d’écouter d’excellentes choses dans les prochains mois. Denzel Curry est enfin sorti de son silence en publiant Envy Me, nouveau titre qui annonce son prochain double EP qui sortira le 26 mai. Snoop Dogg est revenu avec du soleil (et Pharrell Williams) pour Peaches N Cream, premiers single de BUSH, son treizième album. En outre, YelawolfWaka Flocka Flame et Lil Durk vont chacun sortir un album. En 2015, les mois se succèdent et les bonnes surprises font de même. Pourvu que ça dure.

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1. Future – March Madness [Prod. Tarantino]
2. Freddie Gibbs – Pronto [Prod. Mikhail & Pops]
3. Kendrick Lamar – King Kunta [Prod. Sounwave & Martin]
4. Denzel Curry – Envy Me [Prod. Ronny J]
5. Snoop Dogg – Peaches N Cream (Feat. Charlie Wilson) [Prod. Pharrell Williams]
6. Future – Trap Niggas [Prod. Southside]
7. Bodega Bamz – Bring Em Out (Feat. Flatbush Zombies) [Prod. V’Don]
8. Ludacris – Beast Mode [Prod. 1500 Or Nothin’]
9. Lupe Fiasco – Atomic Misphilosophy [Prod. 1500 Or Nothin’]
10. Yelawolf – Led Zeppelin Freestyle [Prod. Led Zeppelin]
11. Chinx – Dope House (Remix) (Feat. French Montana & Jadakiss) [Prod. Velous]
12. Beedie – Make A Wish (Feat. Wiz Khalifa) [Prod. Jay Card & Will Brown]
13. Flatbush Zombies – RedEye To Paris (Feat. Skepta) [Prod. Erick Arc Elliott]
14. Ludacris – Come And See Me (Feat. Big K.R.I.T.) [Prod. Mike Will Made It]
15. B. Wil – Ridin’ Sleath (Feat. Boosie Badazz)
16. Lil Durk – Like Me (Feat. Jeremih) [Prod. Boi-1da & Vinylz]
17. Scotty ATL – Keith Sweat (Feat. Big K.R.I.T., Goldy & London Jae) [Prod. DJ Burn One]
18. Ace Hood – 100 Foreva [Prod. Sonny Digital]
19. Waka Flocka Flame – Rotation (Feat. Future) [Prod. Southside]
20. Wiz Khalifa & Ty Dolla $ign – Post Up [Prod. Ty Dolla $ign]

Par Dimitri.

Best Of Du Mois Rap US Top Songs

[Chronique] Kendrick Lamar – To Pimp A Butterfly

Kendrick Lamar… Ce nom n’a cessé de résonner dans la tête des amateurs de Hip-Hop depuis son premier album studio, Good Kid, M.A.A.D City, acclamé dès sa sortie comme un classique, chose plutôt rare pour les rappeurs d’aujourd’hui. Seulement Kendrick Lamar n’est pas tout à fait comme n’importe quel rappeur lambda. Entre la sortie de GKMC et celle de To Pimp A butterfly, son nouvel album, rares ont été ses sorties, tant médiatiques que musicales, gonflant ainsi les attentes de ses fans, de plus en plus nombreux depuis son succès mondial de la fin 2012. 

La sortie d’un album de Kendrick Lamar est à marquer au fer rouge tant l’excitation provoquée paraît irréelle. Il faut dire que le rappeur de Compton nous a habitué à des recueils de qualité; Good Kid, M.A.A.D City, qui l’a consacré aux yeux du grand public, bien évidemment, mais également son premier projet, moins connu mais tout autant délicieux, Section.80. Normal donc que ses sorties soient autant scrutées. To Pimp A Butterfly n’aura ainsi pas échappé à la règle. Après le single controversé « i », acclamé par la critique, moins par ceux qui ne sont pas grands fans des mélanges de genres musicaux, ou le très engagé The Blacker The Berry, c’est donc un album attendu au tournant qui débarque dans les bacs.

Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’encore une fois Kendrick Lamar aura surpris tout son monde avec un album d’une qualité hors du commun. Entouré de producteurs tels que Flying Lotus, Terrace Martin ou encore Pharrell Williams, le rappeur de Compton a choisi de se lancer dans la musique black dans son ensemble, s’appuyant sur des instrus totalement novatrices faites de mélanges de Blues, Jazz, Soul ou encore de Funk. Kendrick a ainsi su sur cet album se renouveler tout en se basant sur ses acquis de longue date; à savoir une voix autant précieuse que singulière, un flow plus qu’entraînant, des gimmicks originaux et une parfaite maîtrise des temps morts, comme ces interludes ou ces dialogues auxquels il nous a habitués sur ses précédents projets. Vous l’aurez donc compris, Kendrick a fait du neuf avec du vieux, et réussi un pari osé en créant un album cohérent aux contours bien définis.

Car tel le Ghetto Pasteur, Kendrick prêche tout au long de cet album la bonne parole. Celle qui a vu les noirs s’émanciper de la ségrégation dans les années 60 aux USA. Il n’utilise ainsi pas uniquement les sonorités des musiques noires américaines, mais également les codes de cette culture à une époque où elle n’est pas réellement valorisée, histoire de mettre en lumière cette partie sombre de l’histoire, de rappeler les maux passés, afin de ne pas les oublier mais également ne pas les reproduire. Car c’est bien là le point majeur de son raisonnement. S’il parle souvent du passé, les motivations de Kendrick sont décidément bien dirigées vers le présent, comme si la société américaine n’avait jamais vraiment réussi à détruire cette séparation, celle qui a vu les ghettos des grandes villes américaines se transformer en cités pour les noirs, là où la misère est cachée, où le confort est accessoire, où le bonheur ne s’achète pas.

Utilisant la narration pour conduire le spectateur dans une aventure, To Pimp A Butterfly est plus qu’un album, c’est une expérience au coeur des ghettos noirs, au coeur des problèmes des gens qui comptent peu, ceux que l’on ne montre pas à la télé, qu’on n’écoute pas souvent et qui sont livrés à eux-mêmes. Ces gens-là, Kendrick leur fait une ode dans un album décidément engagé pour une cause oubliée. Rappelant le titre du célèbre livre, To Kill A Mockingbird, dans lequel Harper Lee fait une comparaison entre ces oiseaux moqueurs, qui ne nichent pas dans les jardins ou sur les toits des humains mais qui se contentent de chanter pour leur oreille et qui sont pourtant pris pour cible, et les hommes de couleur; To Pimp A Butterfly veut casser l’image de l’homme noir qui est généralement montré comme un gangster, et dont les vraies valeurs ne sont que très peu représentées.

C’est ainsi que Kendrick nous conduit dans un voyage alliant tous les aspects de la communauté black des Etats-Unis, celle de laquelle il est issu et celle qu’il veut aujourd’hui à tout prix mettre en lumière. Entre culture musicale, valeurs de la vie en communauté et problèmes du quotidien, To Pimp A Butterfly est autant une aventure singulière dans la vie difficile que mène cette communauté, qu’un plaidoyer pour rappeler les blessures d’un combat qui ne s’est jamais réellement arrêté, mais qui s’est plutôt fondu dans le décor afin de se faire oublier. Le tout en musique, réalisé de main de maître par celui qui s’élève de plus en plus comme l’unique voix de tout un peuple.

Par Manu.

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[Rétrospective 2014] Les morceaux US de l’année

Du Nord au Sud, des Flatbush Zombies à Big K.R.I.T., cette playlist hautement subjective trace tout de même quelques grands traits de cette année 2014: la popularité de Young Thug, la quasi unanimité autour de Days Before Rodeo, les révélations Vince Staples ou Isaiah Rashad et un aperçu des producteurs de demain, comme Metro Boomin’ ou DJ Dahi. Aussi, cette playlist constitue la meilleure des introductions aux tops qui suivront sous peu. Bonne écoute!


HS87 – Grindin’ My Whole Life [Prod. Hit-Boy]

Travi$ Scott – Don’t Play (Feat. The 1975 & Big Sean) [Prod. Vinylz, Allen Ritter, Travi$ Scott & Kanye West]

T.I. – About The Money (Feat. Young Thug) [Prod. London On The Track]

Shy Gizzly – Awwsome (Remix) (Feat. 2 Chainz & A$AP Rocky) [Prod. EA]

YG – Who Do You Love (Feat. Drake) [Prod. DJ Mustard] Jeezy – Me OK [Prod. Drumma Boy]

Mac Miller – Insomniak (Feat. Rick Ross) [Prod. Big Jerm]

Tory Lanez – Mama Told Me [Prod. Ryan Hemsworth, Tory Lanez & Play Picasso)

Jeezy – Seen It All (Feat. Jay Z) [Prod. Cardo]

2 Chainz – Trap Back [Prod. Street Symphony & 808xElite]

Travi$ Scott – Skyfall (Feat. Young Thug) [Prod. Metro Boomin’ & Travi$ Scott]

Young Thug – The Blanguage [Prod. Metro Boomin’]

Stalley – One More Shot (Feat. Rick Ross & August Alsina) [Prod. Noel]

Ty Dolla $ign – Stand For [Prod. Diplo & DJ Dahi]

E-40 – Choices (Yup) [Prod. Poly Boy]

Travi$ Scott – Mamacita (Feat. Young Thug & Rich Homie Quan) [Prod. Metro Boomin’, DJ Dahi & Travi$ Scott]

Big K.R.I.T. – Mt. Olympus [Prod. Big K.R.I.T.]

Run The Jewels – Close Your Eyes (And Count to Fuck) (Feat. Zack De La Rocha) [Prod. El-P]

Lil Herb – 4 Minutes Of Hell Part. 3 [Prod. Luca Viali]

Flatbush Zombies – Don’t Do Drugs Kids [Prod. Erick Arc Elliott]

100s – Can A Nigga Hit It [Prod. League Of Starz]

Big K.R.I.T. – Cadillactica [Prod. Big K.R.I.T.]

Isaiah Rashad – Modest [Prod. Chris Calor]

ScHoolboy Q – Blind Threats (Feat. Raekwon) [Prod. LordQuest & Sounwave of Digi+Phonics]

The Underachievers – Quiescent [Prod. Lapalux]

Clockwork Indigo – Butterfly Effect [Prod. Erick Ark Elliott]

Freddie Gibbs & Madlib – High (Feat. Danny Brown) [Prod. Madlib]

Vince Staples – 45 [No I.D.]

Kendrick Lamar – i [Prod. Rahki]

Cam’Ron & A-Trak – Dipshits (Feat. Juelz Santana & Dame Dash) [Prod. A-Trak & Just Blaze]

Par Dimitri.

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[Chronique] YG – My Krazy Life

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Aujourd’hui, la Ratchet Music est le son de la Côte Ouest qui domine dans les charts. Ce genre répétitif et minimaliste, destiné à enflammer les strip clubs, brille aujourd’hui grâce à plusieurs californiens : The Invasion, League Of Starz ou DJ Mustard. C’est principalement ce dernier qui en est l’acteur éminent et qu’il l’a popularisé avec l’aide de YG, jeune rappeur de Compton, pour qui il est DJ. Ensemble, ils ont livrés plusieurs mixtapes et des hits endiablés, avant ce premier album, sorti sur Pu$haz Ink, CTE World et Def Jam. Célébrant les 5 ans de la sortie de prison de YG, My Krazy Life, autobiographie de son auteur, est un album surprenant de qualité. 

Efficace en single, la formule développée par YG et DJ Mustard sur mixtapes laissait, cependant, entrevoir quelques défauts. Trop répétitives par moment, les instrumentales de DJ Mustard avaient trop souvent une orientation proche du single. De ce fait, les mixtapes, entachées en plus d’interludes inutiles, perdaient en cohésion. Pourtant, aidé par Young Jeezy dans le rôle de producteur exécutif, YG livre un premier album maîtrisé de bout en bout, des transitions jusqu’à la ligne directrice de l’album, qui rappelle d’ailleurs fortement celle du good kid, m.A.A.d city de Kendrick Lamar. Si les mixtapes de nos deux compères étaient excessivement longues, My Krazy Life ne comporte que 13 titres, sans compter l’introduction et les trois morceaux de l’édition deluxe. On gagne en cohésion grâce à un certain storytelling développé tout au long de l’album tandis que Terrace Martin, Ty Dolla $ignMetro Boomin’ ou Ali de TDE prêtent main forte à DJ Mustard et diversifient ainsi quelque peu l’ensemble de l’album.

Alors que dans good kid, m.A.A.d city, Kendrick Lamar était un spectateur las de l’engrenage de sa ville, YG en est acteur dans son album, par un même jeu d’interludes. Malgré les mises en garde de sa mère dès l’introduction, YG nous dresse un portrait sombre de Compton, dès ce puissant BPT ou dans Meet The Flockers, aussi, dans lequel il nous apprend les règles à respecter pour réussir un cambriolage. Autobiographique, My Krazy Life nous explique pourquoi YG ne croit plus à l’amour, dans ce surprenant My And My Bitch, et la raison de son incarcération dans cet excellent 1AM. Ainsi, ces morceaux, les singles et les titres plus Rn’b, comme Do It To Ya, sont liés les uns aux autres par cette ligne directrice. YG fait-il, de manière flagrante, acte de mimétisme ou ce sont les vies à Compton qui se ressemblent?

Même si aucun travail de fond n’est effectué au niveau de ce storytelling, cette démarche permet à l’album d’être plus introspectif, d’apporter une certaine cohésion et, aidée par les nombreux featurings, d’effacer un peu les carences indéniables d’YG au micro. Malgré cela, et un Do It To Ya ennuyeux, My Krazy Life s’avère être un produit travaillé, surprenant par sa qualité, venant d’un duo dont on n’attendait pas autant.

Par Dimitri

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[Chronique] ScHoolboy Q – Oxymoron

Mardi 25 février 2014 aura été un petit évènement pour le Hip Hop. Oxymoron, annoncé et attendu depuis plus d’un an, sort enfin dans les bacs. ScHoolboy Q met ainsi fin à une attente interminable et en profite pour se retrouver au centre de toutes les attentions. 

Après une première écoute, la plupart des fans de Groovy Q auront certainement un petit goût amer en bouche, une sorte de déception face à un album dont ils attendaient énormément. Il faut dire qu’avec tout ce qui a précédé la sortie de cet opus, beaucoup espéraient un album d’une dimension supérieure. Raté. Mais cela ne signifie pas qu’Oxymoron est un mauvais album, loin de là. Car le vrai niveau de cet album ne se révèle qu’une fois la première écoute et toutes les attentes l’entourant mises de côté. Ce n’est qu’une fois détaché de ces espérances qu’on peut enfin apprécier cet opus à sa juste valeur.

Cette petite déception donc, est due à une dimension que l’album n’a pas. En effet, on s’attendait à une cohérence présente du début à la fin, et force est de constater que certains morceaux font tâche. Que vient faire Collard Greens, son aux penchants pop et plutôt festif, ou Man of The Year au milieu d’une atmosphère sombre qui semble être le leitmotiv de cet album? Ces singles, nécessaires pour la promo de l’album et pour toucher un public de plus en plus large, et bien que d’un très bon niveau, ne s’insèrent pas au mieux dans l’ambiance globale de cet opus, et nuisent finalement à la cohérence du projet. Il en va de même pour Los Awesome (feat. Jay Rock), pourtant doté d’un très bon couplet de Jay Rock ou The Purge (feat. Tyler, The Creator & Kurupt) qui ne collent pas au rythme de l’album.

Cependant, ces morceaux mis à part, le reste de l’album s’avère être très cohérent, que ce soit dans l’ambiance ou dans le style. On fait de la sorte face, le tout dans une atmosphère lourde et très sombre, à des morceaux posés, voir presque intimes, à l’image de Blind Threats (feat. Raekwon) ou Grooveline Pt. 2 (feat. Suga Free) (Deluxe Edition), ainsi qu’à des sons bien plus aggressifs et dans lesquels on retrouve ce chien fou et enragé qu’est ScHoolboy Q. C’est le cas sur Gangsta par exemple, qui ouvre de la meilleure des manières cet album, ou encore sur What They Want (feat. 2 Chainz) ou Break The Bank. Et pour que le lien entre ces deux postures soit complet, certains morceaux comme Studio (feat. BJ The Chicago Kid) ou Hell of A Night font office de mix entre instrumentales mélodieuse et rythme assez tranquille et cette touche d’agressivité que l’on retrouve dans la voix de Q.

Au final, cette déception, presque inévitable tant les attentes étaient grandes, qui nous frappe au premier abord n’est que passagère. Car c’est une fois seulement que cette première impression a été mise de côté que l’on peut réellement s’ouvrir à cet album. Lorsque cette étape est passée, ces sons nous emmènent de force dans cette ambiance sombre que ScHoolboy Q maîtrise à merveille et ne nous lâchent plus.

Par Manu.

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Pourquoi Oxymoron est l’album le plus attendu de 2014

Le 25 février 2014, dans un mois, sortira Oxymoron, troisième album studio de ScHoolboy Q, et avec cette sortie prendra fin une attente démesurée, et qui place la barre haute quant au niveau que ce nouvel opus devra atteindre. Retour sur une attente de plus d’un an.

Parce que l’attente aura été interminable

Cela fait bien plus d’un an que tous les fans de ScHoolboy Q attendent impatiemment la sortie d’Oxymoron, initialement annoncé pour l’année 2013 mais sans plus de précisions. C’est finalement le mois prochain que le monde du Hip-Hop se tournera vers Los Angeles pour accueillir le nouvel album d’un des rappeurs les plus en vogue de la scène new school. Car effectivement, Groovy Q a ce quelque chose de particulier qui nous donne toujours envie d’en avoir plus de lui, et c’est peu dire qu’on attend ce plus impatiemment. Malgré de bonnes apparitions dans cette année 2013, le natif de Francfort a irrité ses fans, voire même déçu. Oxymoron devait sortir en 2013, certains ont espéré toute l’année pouvoir se plonger dans ce nouvel album, en vain. Il n’aura même pas été rare de le voir comparé à Detox, le célèbre album de Dr. Dre, célèbre car annoncé mais jamais exaucé. Mais on aura finalement eu une date en fin d’année, une date qui vient concrétiser un projet qui aura eu le temps de susciter beaucoup d’intérêt, mais également beaucoup d’interrogations.

Parce que les singles sont prometteurs

Quatre. Voilà le nombre de singles sortis avant la publication de l’album, du moins en théorie. Si la tracklist n’est pas encore sortie officiellement, on sait déjà que quelques titres sortis recemment se retrouveront sur l’album, à l’image du morceau aux penchants pop Collard Greens (feat. Kendrick Lamar), qui a déjà été confirmé depuis un bout de temps maintenant, ou de Man of The Year dont le clip est sorti en ce mois de janvier. Hell of A Night et Break The Bank, paru la semaine passée en même temps que la cover de l’album, viennent compléter cette liste de singles. Et s’ils donnent un avant goût justifié de ce que sera le projet final, alors on est en droit d’attendre un album de haut niveau. En effet, tous ces singles sont plutôt réussis, avec des influences différentes, que ce soit pop ou électro, et cela n’aurait aucun sens de lâcher les meilleurs morceaux de l’album comme singles. La qualité devrait donc être au rendez-vous du 25 février.

Parce qu’il devra faire mieux qu’Habits & Contradictions

Tout fan de ScHoolboy Q qui se respecte connaît et vénère Habits & Contradictions, son dernier album, paru début 2012. Et alors que l’attente est sur le point de se terminer, cet opus fait office d’exutoire pour évacuer une frustration qui dure depuis de trop longs mois. Il faut dire que cet album était de haut niveau, dans la veine de ceux qui ne fatiguent jamais et que l’on peut réécouter sans aucune limite. C’est d’ailleurs à ce jour le projet référence de Q, celui sur lequel on le voit là où il est le plus habile, dans des couplets endiablés, des instrumentales sombres et glauques, ou encore des délires de toxicomane. Et si ScHoolboy Q aspire à prendre de plus en plus d’importance sur la scène du Hip-Hop américain, il devra forcément produire un album meilleur que son dernier. Il en a les capacités, cela ne fait aucun doute, il va maintenant falloir le prouver.

Parce qu’il doit faire aussi bien que Kendrick Lamar

“I strive to be better than Kendrick, Ab-Soul and Jay Rock,” Q says. “You have to compete. You can’t just let them niggas just keep shootin’ over you. Especially Kendrick, at the rate he’s going and progressing in this music. It’s inspiring. It’s crazy. I’m glad he dropped [good kid, m.A.A.d city]. If he didn’t drop that album, there’s no telling how good my album would’ve been. It’s competition. I gotta be better than his shit or just as good. It has to be just as good or better.” ¹

C’est certainement l’objectif d’Oxymoron qui sera le plus dur à atteindre. En effet, ScHoolboy Q ne compte pas rester dans l’ombre de son compère chez TDE, Kendrick Lamar, qui a fait de son Good Kid, m.A.A.d City un classique dès sa sortie. S’il veut montrer qu’il est de la même veine que son coéquipier, Oxymoron devra forcément laisser une trace indélébile dans le rap game et sur cette année 2014. Et la compétition que s’impose Q avec Kendrick l’oblige à sortir un album aussi bon que GKMC, autant dire que la tâche n’est pas aisée. Rendez-vous dans un mois donc pour voir si l’année 2014 sera celle de Groovy Q.

¹ http://www.hiphopdx.com/index/news/id.25869/title.schoolboy-q-oxymoron-release-date-cover-art

Par Manu.

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[Rétrospective 2013] Artistes US de l’année

MosaïqueFinale

De nos jours, même s’il y joue un rôle important, la sortie de l’album d’un artiste en vogue ne suffit plus pour s’imposer auprès du grand public et de ses collègues du milieu. En effet, la productivité, notamment en ce qui concerne les featurings, est très importante pour s’exporter et bénéficier d’une visibilité plus grande. Ensuite, une présence médiatique et artistique est nécessaire avant la parution de l’album, bien entendu, mais également et surtout après sa sortie, afin d’en continuer la promotion et ne pas se faire éclipser par d’autres artistes ou sorties. Kendrick Lamar nous a ainsi démontré comment il est arrivé à occuper les devants de la scène durant toute cette année 2013 alors que son dernier album était sorti en fin d’année précédente. En outre, une tournée mondiale, un partenariat avec une grande marque ou la participation aux projets de son crew/groupe sont d’autres éléments qui permettent à un rappeur d’imposer sa voix, indépendamment de la sortie de son propre album. Les trois artistes les plus importants de cette année selon HHSOM ont marqué de leur empreinte 2013 par les moyens précités. Découvrez les ci-dessous:

1. Kendrick Lamar

Kendrick-LamarAlors que le magazine Complex désignait, au début du mois d’avril, « The Best Rapper Alive, Every Year Since 1979« , une liste qui consistait à élire le meilleur rappeur de chaque année depuis 1979, il nommait, pour 2012, Drake qui n’avait pourtant pas sorti d’album. Un choix incompréhensible pour certains mais qui s’explique encore cette année avec Kendrick Lamar. Lui non plus n’a pas sorti d’album en 2013. Pourtant, il a occupé les devants de la scène durant toute l’année: premièrement en surfant sur le succès de son deuxième disque good kid m.A.A.d city qui a été certifié platinum au mois de juin. Ensuite avec l’aide de son label TDE, lorsqu’il rappait au côté de ScHoolboy Q sur Collards Green, lors de l’impressionnant remix de U.O.E.N.O. de Rocko, ou encore à l’occasion de leur freestyle au BET Awards. Enfin, il a été présent également grâce ses apparitions sur les morceaux de 50 CentRobin Thicke, Fredo Santana, Young Jeezy, Kid Cudi, Birdman, Tech N9ne ou encore Eminem et en faisant partie de la tournée de Kanye West, excusez du peu. Surtout, c’est son couplet dans Control de Big Sean, dans lequel il défiait ses collègues comme J.Cole, Mac Miller ou A$AP Rocky, et s’établissait en roi de New York, qui lui a permis d’occuper les devants de la scène. S’en est suivi un buzz et une polémique mémorables ainsi que de nombreuses réponses, venant d’MC en manque de buzz comme Joe Budden ou Papoose, ou de jeunes pousses comme King Los ou Joey Bada$$. Si ces arguments ne vous suffisent pas, je citerai encore ses 7 nominations au Grammy Awards. La justification était presque la même pour Drake en 2012 sauf que lui n’avait obtenu que 3 nominations pour cette même cérémonie.

2. Drake

DrakeSi la productivité et la qualité sont deux éléments parmi les plus importants pour être un des rappeurs de l’année, alors Drake mérite sa place sur le podium. En effet, Drizzy a été omniprésent depuis le début de l’année, à partir de la parution du tube Started From The Bottom, jusqu’à la sortie de son troisième album Nothing Was The Same qui s’est vendu à plus de 1,3 millions d’exemplaires, rien qu’aux États-Unis. En guise de promotion, le rappeur Canadien a sorti quelques très bons morceaux comme 5AM In Toronto, Jodeci Freestyle avec J.Cole, The Motion, Girls Love Beyonce, puis All Me. Il a également été un featuring omniprésent cette année pour Snoop Lion, 2 Chainz, DJ Khaled ou PARTYNEXTDOOR, artiste qu’il a découvert récemment. Il a aussi pu collaborer avec Justin Timberlake, Timbaland, YG, Future ou Migos, sur le titre Versace qu’il a grandement aidé à populariser. En outre, Drake a occupé une partie de l’attention par son  festival: OVO Fest en août, qui réunissait des grands noms du milieu comme Ma$e, Diddy, Wale, A$AP Rocky ou Kanye West. Il a également débuté en octobre son Would You Like A Tour, tournée mondiale qui se terminera au mois de mars. Malgré cela, il faudra peut-être que Drake fasse encore plus en 2014 s’il ne veut pas se faire éclipser par Kendrick Lamar son plus grand adversaire, au micro comme sur les charts.

3. A$AP Rocky

asap-rocky-fuckin-problem-500x500Dire qu’on attendait A$AP Rocky au tournant cette année serait un euphémisme. Alors que 2013 sonnait pour lui comme l’heure de la confirmation, Rakim Mayers nous a époustouflé avec son premier album maintes fois repoussé: Long.Live.A$AP. Malgré le fait que ce disque soit sorti en tout début d’année, A$AP Rocky a été un acteur éminent de 2013, grâce à de nombreux featurings et quelques morceaux inédits (Same Bitch avec Trey Songz et R. Cali). Toutefois, son crew, l’A$AP Mob, a majoritairement participé à sa visibilité. En effet, A$AP Rocky fut une pièce maîtresse dans la promotion du premier album d’A$AP Ferg: Trap Lord, en attestent les nombreux freestyle effectués avant sa sortie et sa présence sur deux des trois singles du projet (Work (Remix) et Shabba). De plus, le freestyle des BET Awards fut une autre raison de sa présence médiatique. Toutefois, le fait qu’il nous ait livré un premier album excellent répondant aux attentes, et ce malgré la pression, mérite toute célébration et justifie principalement sa présence dans ce classement.

Par Dimitri.

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[Chronique] Kendrick Lamar – Section 80

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Aujourd’hui, Kendrick Lamar est un des rappeurs les plus en vogue du moment. Son dernier album, Good Kid, M.A.A.D City, est déjà considéré par tous comme un classique. Mais dans l’ombre de cette pépite se trouve son premier album studio, une perle grâce à laquelle King Kendrick s’est tout d’abord fait connaître. Car à l’été 2011, quand sort Section 80, le rappeur de Compton est alors un inconnu ou presque. Un inconnu, certes, mais qui montre déjà qu’il sera tout bientôt l’un des meilleurs.

Section 80 fait preuve d’une cohérence étonnante pour un premier album. Les lignes directrices sont claires, et dirigent les thèmes abordés tout au long du projet. Violence, drogues, prostitution ou encore guerre des gangs, tous les maux qui gangrènent le quartier de Compton sont passés en revue. Car Section 80, c’est d’abord un regard intérieur au quartier le plus chaud de Los Angeles. Celui de la génération née dans les années 80, dont Kendrick fait partie. Lui, ne s’est jamais laissé entraîner par cette spirale de violence qui fait rage dans la rue, et s’en est sorti grâce au Hip-Hop. Mais même s’il n’a pas trempé dans ces histoires, Kendrick Lamar a côtoyé la vie de la rue pendant toute sa jeunesse. Il en a été le spectateur, et c’est ce point de vue qui nous est retranscrit tout au long des 16 titres qui composent cet album, cette part de vie dans le ghetto.

Un combat contre le racisme

Dans les années 80, le racisme revient en force sur le territoire américain. Kendrick Lamar s’est imprégné de cette lutte entre Noirs et Blancs, et il consacre beaucoup d’efforts pour lutter contre le racisme qui sévit toujours aujourd’hui. Par ses textes, mais également par son mouvement, le HiiiPower. Les premier et dernier morceaux de l’album, Fuck your Ethnicity et HiiiPower , illustrent bien ce combat. (Vous trouverez une explication détaillée de ce dernier titre ici.) Le rappeur apparaît donc tout de suite comme un artiste engagé, mettant en avant des valeurs morales qui se perdent petit à petit dans l’enfer du ghetto.

La violence de Compton

Mais le racisme n’est pas le seul fléau de cette génération. Beaucoup de maux bien plus terre-à-terre sévissent à Compton. Et c’est là qu’intervient le storytelling de Kendrick. Plusieurs titres sont racontés comme des histoires, mettant en scène le emcee lui-même où d’autres personnages, fictifs pour la plupart.  La drogue, premièrement, touche la plupart des jeunes du quartier. C’est le cas de la fille de 22 ans que rencontre Kendrick à une fête dans A.D.H.D. Fille perdue, abandonnée à elle-même et qui essaie d’échapper à la dure réalité du quotidien.

Somebody walked in with a pound, of that Bay Area Kush

She looked at me the looked, at it, then she grabbed it

Then she said, get it understood, you know why we crack babies

Because we born in the 80s, that A.D.H.D crazy

Les femmes, elles, ne sont pas en reste. Kendrick nous raconte par exemple l’histoire de Tammy dans Tammy’s Song (Her Evils), femme honnête et fidèle à son homme, mais qui découvrira bientôt que ce n’est pas réciproque. Elle trouvera finalement réconfort dans les bras d’une autre femme ayant eu le même problème. Plus violent, cette fois, l’histoire de Keisha dans Keisha’s Song (Her Pain), belle femme de 17 ans qui se laisse embarquer par un mac dans la prostitution. Son sort sera plutôt glauque, vu qu’elle finira violée et poignardée à l’arrière d’une voiture, puis laissée pour morte dans une ruelle de Compton.

And in her heart she hate it there but in her mind, she made it where

Nothing really matters, still hit the back seat

And caught a knife inside the bladder, left her dead, raped in the street

Son ascension dans le rap

Heureusement pour lui, la vie de Kendrick Lamar s’est éloignée de la rue, et ce grâce au Hip-Hop. L’inconnu qu’il est alors va vite se faire un nom, notamment grâce au succès que Section 80 va rencontrer. Ce succès qui aujourd’hui n’est plus à conquérir, le emcee l’annonce dans plusieurs morceaux de ce premier album. Il est prêt à écraser la concurrence et à tout faire pour devenir le roi du Hip-Hop. Blow my High ou le sombre The Spiteful Chant, par exemple, illustrent à merveille cette envie de conquête. S’il veut monter les échelons du rap game, il ne doit compter que sur lui-même, et ignorer les fausses personnes qui le suivent pour ce qu’il va devenir.

I know a lot of people that smile in my face

But talk behind my back when I’m gone

So when they call my number, I don’t never pick up

I d’ont owe you shit, bitch, leave me alone

I’m going big, suck my dick.

Finalement, outre la qualité technique aiguisée dont fait preuve Kendrick Lamar tout au long de Section 80, nombreux sont les enseignements que l’on peut tirer de cet album. Il paraît évident dès la première écoute que ce rappeur a quelque chose de plus, quelque chose qui va le projeter sur le devant de la scène, sous la lumière des projecteurs après avoir grandi dans les rues sombres de Compton. Section 80 lance de belle manière ce succès, puisque l’album, seulement disponible en version électronique et n’ayant fait l’objet d’aucune promotion, s’est tout de même vendu à 100’000 exemplaires en à peine deux semaines.

Cet album est une invitation à entrer dans sa vie, au sein du quartier le plus chaud de Los Angeles. Sorte d’autobiographie avant l’heure, Section 80 est étonnement complet, cohérent et touchant. Anecdotique et généraliste, superficiel et profond à la fois, il suffit d’entrer dans cet univers pour se faire une idée de ce que vit cette génération maudite, de la violence, physique ou psychologique, qui régit tous les rapports que l’on peut trouver à Compton.

Par Manu.

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[Chronique] Dom Kennedy – Get Home Safely

Eazy-E, Ice Cube, Snoop Dogg, Dr. Dre, Tupac Shakur, Death Row, Game… Tous ces noms ont eu un passé glorieux sur la longue baie californienne et tous se sont passés la torche. Désormais c’est au tour de Kendrick Lamar et de son collectif TDE de régner sur les longues journées ensoleillées dans la cité des anges. Mais ces noms cités ci-dessus ont aussi un autre point commun, ils ont tous brillé certes, mais aussi laissé d’autres rappeurs talentueux dans leur ombre qui n’ont pas pu autant profiter de la chaleur et du soleil de la côte Ouest. C’est ainsi que Dom Kennedy se trouve éclipsé par K.Dot et ses potes depuis le premier jour de leur montée au sommet. Un rappeur talentueux très attaché à ses racines californiennes qui n’hésite pas à mettre en valeur tout ce qui vient de L.A.

Plongeons directement dans l’ambiance de l’album avec Let’s Be Friends, qui sert d’introduction et explique une journée typique d’un gars vivant dans les environs de South Central à Los Angeles. C’est exactement ce genre de chansons que nous offre Dom dans ce projet. Des morceaux soul/funk décontractants et entraînants accompagnés d’un rythme calme. All Girls Crazy  et Honey Buns sont d’autres pistes dans la même lignée également. Des morceaux où l’on peut apprécier les riches productions mises en avant par The Futuristiks qui font un travail complet et énorme dans cet opus avec douze instrumentales produites.

L’un des points forts de cet album est donc cette connexion producteur/artiste qui permet à Kennedy de se mettre plus en valeur sur ces resplendissantes mélodies qui collent tant bien à l’esprit (et au flow) du MC. De ce fait, ce dernier s’est trouvé irrémédiablement une technique qui lui va à merveille. Il s’agit d’adopter des couplets à l’allure très lente, voire apathique, et de faire une pause de quelques secondes entre chaque milieu de phrases avant de les poursuivre. Cette méthode n’est pas sans rappeler quelques artistes hip-hop de la scène californienne au milieu des années nonante. Le morceau 17, qui raconte sa vie à dix-sept ans, en est le parfait exemple :

I never had a chance to be in the U.S. Open
I used to collect cans for them U.S. tokens
It’s that time of the month? girl, we use that lotion
Before the president was black, shit I wasn’t votin’

Comme je l’ai dit précédemment, les morceaux de Dom traitent régulièrement de quelques journées normales à LA, des Lakers mais aussi des femmes qui est un sujet de prédilection du rappeur où il utilise beaucoup de refrains chantés qui conviennent parfaitement à l’ambiance du morceau. Le californien fait appel à des connaisseurs du coin pour lui prêter main forte dans cette galette. Krondon, Skeme, Nipsey Hu$$le et le chanteur TeeFlii en sont les principaux concernés.

Même si Tryna Find My Way, Pleeze et le single South Central Love sont les points forts de l’album, quelques auditeurs pourraient y trouver aussi des aspects négatifs comme cette ambiance nonchalante, flegmatique et persistante tout au long de l’album qui pourrait ne pas plaire à plus d’un. Toutefois, des surprises nous sont néanmoins réservées comme cette production sortie de nulle part de DJ Mustard dans Nothing Like Me où l’adepte de la ratchet music s’essaie à un tout autre style assez convaincant.

Alors que Kendrick et consorts monopolisent la scène hip-hop par leurs succès récurrents, Dom Kennedy continue, lui, son chemin dans les allées de Leimert Park en bouclant un album riche et complet qui suit la lignée de son précédent et très bon, The Yellow Album. Ceci confirme aussi que les caractéristiques du rappeur sont rares et uniques dans sa catégorie actuellement. Pour finir, Get Home Safely est un album qui plaira par son style singulier, son ambiance brillante et sa sonorité West Coast aux amateurs de ce genre, qui a, de nos jours, tendance à innover dans un tout autre style.

13/20

par Kevin

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