Généralement, une rupture peut engendrer une période de post-dépression pour la majorité des individus mais Future a connu le contraire. Depuis sa séparation avec la chanteuse Ciara au milieu de l’année passée, le rappeur d’Atlanta a enchaîné trois mixtapes entre fin 2014 et durant le premier semestre 2015. Le plus impressionnant c’est que ces projets gratuits sont tous de bonne qualité et ont placé l’emcee parmi les artistes les plus courtisés du rap game avec Drake, Kendrick Lamar ou encore Meek Mill. Honest, sorti début 2014, contient son lot de hits et a été un succès commercial, mais il n’était pas vraiment à la hauteur des attentes de sa fan base pour un projet officiel. A croire que la rupture quelques mois après avec Ciara ait réveillé le monstre qui sommeillait en lui. S’en est donc suivi trois immenses opus gratuits : Monster, Beast Mode et 56 Nights. Tous de bonne qualité mais contenant des ambiances et styles différents les uns des autres. Il y a maintenant deux semaines, le natif d’Atlanta a annoncé la sortie de Dirty Sprite 2, la suite de l’une de ses premières mixtapes, mais cette fois-ci en tant qu’album officiel. Est-ce que Fewtch a atteint son apogée ?
Mariant parfaitement son flow mélodieux avec les instrumentales qui lui sont servies sur un plateau. C’est le point fort de Future. Il a cette impressionnante capacité de combler les vides que pourraient laisser une production trop sobre en ajoutant des sonorités ou des syllabes supplémentaires mi-chantées mi-rappées à chaque fin de couplet. La preuve étant qu’il est (très) difficile de reprendre ses morceaux en essayant de faire ressortir les mêmes émotions. Une ambiance propre à Future Hendrix que seul ce dernier arriverait à reproduire. Et c’est ce que l’on retrouve dès le début de l’album avec Thought It Was A Drought et I Serve The Base l’une s’appuyant sur son texte et son refrain accrocheur et l’autre, plus sauvage et plus sombre, où l’on reçoit une claque à chaque coup de basse délivré par Elijah Sacci et Metro Boomin.
I just fucked your bitch in some Gucci flip flops
I just had some bitches and I made ’em lip lock
I just took a piss and I seen codeine coming out
We got purple Actavis, I thought it was a drought
Avec des punchlines tenaces qui font déjà le tour du web, l’artiste excelle dans ce domaine et nous laisse régulièrement une ou deux phrases accrocheuses à chaque fin de morceau comme dans les énergiques Stick Talk et Freak Hoes. Contrairement à son précédent projet qui était inondé de featurings, Dirty Sprite 2 n’en contient qu’un seul. Un point fort du projet qui permet à Future de s’exprimer plus librement. C’est ce qui nous permet d’immerger plus facilement dans son univers à la fois mielleux mais aussi brutal. Ce seul invité n’est nul autre que Drake ce qui nous donne une collaboration de luxe sur l’excellent Where Ya At où les deux artistes déballent leurs problèmes sur une instrumentale produite par Metro Boomin de nouveau.
L’atmosphère de DS2 s’appuie aussi fortement sur les productions laissées par Metro Boomin, Southside, Sonny Digital et Zaytoven. En effet, l’équipe de producteurs travaillent régulièrement ensemble et proviennent tous d’Atlanta. Et Future a fait appel à ses derniers pour l’élaboration de ses trois derniers projets gratuits. Grâce à cette alchimie et cohésion positive, l’album contient une certaine homogénéité. Que ça soit sur Colossal, où l’on retrouve les boucles de piano typées Zaytoven ou encore sur le paisible Rich $ex qui cible ses conquêtes féminines, Fewtch arrive facilement à s’adapter aux mélodies livrées par ses compères ou c’est plutôt l’instrumentale qui s’adapte au flow mélodieux de l’artiste. Mais c’est sur Blow A Bag, single de l’album, que l’artiste démontre tout son talent. Un refrain acharné mais énergique, des couplets assurés mais surtout un timbre de voix harmonieux que le rappeur n’hésite pas à varier tout au long du morceau selon les synthétiseurs utilisés par les producteurs.
S’affichant comme la suite de Dirty Sprite, DS2 confirme que le rappeur est au sommet de son art et s’installe incontestablement comme l’artiste le plus en forme et le plus courtisé sur la scène d’Atlanta. N’ayant probablement pas la technique et le flow de Kendrick ou la voix et le génie de Drake, Future se démarque par ce qu’il sait faire de mieux ; des paroles inarticulées, un flow syrupeux, sûrement aidé par quelques gorgées de codéine et une adaptation impressionnante à des instrumentales trap ou plus paisibles. Un tout qui le rend authentique dans une ambiance et atmosphère que nul autre arriverait à reproduire jusqu’à maintenant. Son premier album intitulé Pluto, l’a révelé aux yeux du public. Le suivant, Honest, lui a permis de côtoyer les plus grands du rap game et d’effectuer des gros hits. Mais Dirty Sprite 2 englobe tout ce que Future sait faire de mieux et s’impose comme son album le plus réussi et surtout le plus honnête.
Kevin