Connaissez-vous Anton Serra? Ce vandale de Lyon qui accessoirement fait du rap avec son crew, la toujours plus fameuse Animalerie! Juste une année après le premier album intitulé Sales Gones («sales gosses» en patois), voici Frandjos, second album de ce petit génie de la poésie énervée qui sait faire parler toutes les émotions. Vraisemblablement les Frandjos de l’artiste sont d’abord ses deux grands frangins, et ensuite sa famille au sens le plus large du terme, tous les potos inclus. Voilà pour le titre, l’artiste se décrira lui-même à travers les chansons que je vais présenter une à une, intérêt qu’elles méritent, vu la multiplicité des thèmes qui sont abordés. L’album contient 14 titres, dont 2 remix ( Frandjos et Aimer tue), leurs instrus valent le détour. Attaquons:

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1. Frandjos
Le titre de l’album apparait à la première chanson, on retrouve la nostalgie du rappeur, un regard sur ses frérots, un passage aux éternelles heures de délire avec les potes, puis un premier coup dans les jambes, la perte d’un frère en 94. Trois couplets qui lient Anton Serra à ses Frandjos, dans les liens du sang, avec des potes, parfois avec des pertes. Ce titre, avec ces trois aspects, insiste sur le fait que la famille (encore une fois au sens large) est présente dans tous les moments, du berceau à la tombe. C’est un hommage à ces liens qui nous font délirer quand tout roule et peuvent nous tenir debout quand ça dérape.

2. Aimer Tue
Ce texte magnifiquement composé de divers jeux de mots contient une métaphore filée, comme dirait mon prof de français, sur toute la durée du titre. Les femmes et les clopes, voilà la comparaison qui tient la chanson, à l’image du titre qu’on pourrait voir affiché sur les poitrines dans la rue. Le nombre de jeux de langage, de double-sens utilisé est remarquable, l’auteur veut arrêter mais il n’y parvient pas.
« Aucune chance pour le strike, pas d’Lucky pour faire tomber les quilles»
L’addiction aux femmes comme aux cigarettes le tourmente mais produit aussi des plaisirs considérables… «Aimer tue? j’te pose la question». Magnifique texte, magnifique chanson, une préférence pour l’instru du remix.

3. J’voulais pas (feat Enapoinka)
Suite du J’voulais du premier album qui décrivait ses envies de gamin, voici le même délire à l’inverse. Chanson sympa qui renoue avec l’éternel enfant qui séjourne en chacun de nous (surtout en Anto). Accompagné d’Enapoinka, autre membre de l’Animalerie, il nous livre ce qu’il ne voulait pas en tant que jeune adolescent.

4. Sans Toi
La femme source d’inspiration? Si on la retrouve souvent dans des chansons peu joyeuses dans le rap, Anton l’aborde ici d’une manière différente, pleine de questions. D’une manière si tordue d’ailleurs qu’il m’a fait douter qu’il parlait bien de sa bien-aimée. Très belle chanson, un clip avec Oster Lapwass.

5 Hé Oui (feat Missak)
Hé oui! L’Animalerie pète sa mère! Un texte qui parle de la place de ce groupe dans le rap. Hé oui, ils sont bien moins connus et bien meilleurs, ils s’y font peut-être gentiment mais ne peuvent pas s’empêcher de dire que c’est qu’une question de logique, y’a beaucoup de déchets dans le rap. Missak est un sacré kickeur et apporte du lourd à ce son:
« La vérité ça va pas, comme airmax, pattes d’éph’»

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6.Why Not Groove
Une ambiance particulière, bien festive, chill dans ce titre qui pourtant critique un interlocuteur, un rappeur «bad boy» qui se prend largement la tête, ce qui suit bien la chanson précédente. Ce morceau illustre bien le concept de «groove», l’instru nous emporte.

7. Navigator
«Dans l’océan de mes feuilles volantes, ma petite croisière a jeté l’encre»
La vie n’est pas un long fleuve tranquille, plutôt une mer agitée pour Anton Serra. A nouveau une métaphore qui tient une chanson entière. Je vais laisser le texte parler:
«Ne cesse jamais de ramer, c’est pourtant pas la mer à boire.»

8. Zaïro
« Moi j’rap par le biais du graffiti» nous confie notre artiste dans ce morceau. Le titre vient d’un graffeur décédé le 19 novembre 2011 d’un coup de couteau et ce morceau lui laisse un hommage convaincant, montrant l’amour de l’artiste pour cet art de rue. On retrouve les disciplines du hip-hop toujours liées.

9. Toujours le même thème (feat Enapoinka)
«Nique la police!» rengaine éternel du rap, arrive avec une ambiance film de cow-boy et est scandée une fois de plus avec succès bien qu’ils soient conscients de la répétition. On parle des facultés intellectuelles exceptionnelles des agents.

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10. Not’ Ville (feat Lucio Bukowski)
Lyon, ville de l’Animalerie avec Bukowski deuxième du nom, poète rappeur que j’affectionne particulièrement. La ville est personnifiée tout au long de la chanson, joli duo où les deux rappeurs se renvoient la parole, très belle maitrise, belle réussite.

11. Requiem pour un Cauchemar
Référence, bien sur, au film «Requiem For A Dream» qui aborde, à l’instar de la chanson, les dangers de la drogue. Pas du tout moralisateur, simplement réaliste, les suites cauchemardesques éventuelles de la toxicomanie sont présentées, l’ambiance la plus noire de l’album, pas moins réussie.

12. La Carte de L’ignorance (feat Dico et Nadir)
« La vie est bien plus belle quand elle est romancée
un nanar écrit one-shot qu’on aimerait tant recommencer »
La réflexion, son trop plein, tout ce qu’on aimerait pas savoir, voilà le thème de la chanson, l’absurde, parfois. Un gros retour de Nadir qui fait vraiment plaisir. Des doutes qui reviennent, peut-être ma chanson préférée de l’album.

On arrive à la fin de ma chronique un peu longue de cet excellent album! Je dois avouer qu’à la première écoute, je le croyais inférieur au premier mais plus je l’écoute, plus je le trouve abouti. A vous de juger, bonne écoute!

Voici le lien du site de l’animalerie, là où vous devez vous rendre pour soutenir tout ce beau monde: http://www.osterlapwass.fr/crew/1

16/20

Par Loïc

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